L'avance alliée en Italie le long de la mer Tyrrhénienne de Cassino à la ligne gothique était la responsabilité de la 5^ Army U.S.A.; dans le secteur de la Toscane, où le territoire était plat le long de la mer pour grimper progressivement jusqu'aux premières montagnes des Apennins, trois divisions d'infanterie étaient essentiellement engagées: le 34^ Red Bull à gauche, le long de la côte et des collines inférieures; la 91^ Powder River au centre dans une région encore peu vallonnée, et la 88^ Blue Devils à droite, là où les montagnes commençaient déjà.
La campagne toscane était composée de nombreuses fermes isolées et de petits villages normalement positionnés au sommet de collines plus ou moins hautes, qui offraient de bonnes vues sur les quelques routes existantes.
Pour ces raisons, ils devinrent presque tous des bastions retranchés et fortifiés où les Allemands résistèrent et abandonnèrent la terre mètre par mètre.
L'objectif était de retarder au maximum l'avancée alliée et de laisser le temps aux unités du génie et de Todt de fortifier de plus en plus la ligne gothique, qui devait être le dernier bastion avant les Alpes et donc de l'Allemagne.
Le petit village de Laiatico, moins de mille habitants, s'inscrit dans ce contexte; c'était l'un des nombreux obstacles difficiles qui coûtaient du sang et du travail des deux côtés.
Laiatico est situé à quelques dizaines de kilomètres de chez moi et aujourd'hui il est devenu assez célèbre en Italie pour être le lieu de naissance et la résidence du célèbre ténor Andrea Bocelli, je pense qu'il est bien connu aussi en France comme dans le reste du monde.
Mais à l'été 1944, c'est un village de campagne qui se trouve au centre de six jours de bataille acharnée, du 8 au 13 juillet, abandonné par les habitants et à moitié détruit par le feu de l'artillerie adverse et des chasseurs-bombardiers alliés.
L'unité d'infanterie américaine qui était le principal protagoniste de l'événement était le 351 Rgt. faisant partie de la 88^ I.D.
Certaines photos relatives à notre régiment prises à cette époque et dans ces régions témoignent à quel point la pratique de la décoration des casques était beaucoup plus courante qu'on ne le dit souvent.
Il y a environ cinq ans, je rencontre un ami, un agent immobilier, qui me dit qu'il a trouvé un casque dans une vieille maison de la campagne autour de Laiatico qu'il a été chargé de vendre. Si ça m'intéresse, le casque est dans son bureau et je peux aller le voir quand je veux.
Bien sûr, je me précipite même si je n'attendais pas grand-chose; Je dois dire que je suis surpris car le casque est très intéressant, avec un insigne divisionnaire et nominal.
Malheureusement, ce n'est qu'une coque, il n'y a pas de liner; il n'a pas non plus de jugulaire ce qui est un problème pour un casque américain: difficile à trouver et encore plus à remonter correctement. Et le casque M1 sans jugulaire perd beaucoup de sa beauté, à mon avis.
Et puis le casque est plutôt usé et a été excessivement nettoyé et protégé avec du vernis transparent, pour le conserver: il n'a pas été abandonné mais exposé sur une étagère près d'une cheminée.
Les propriétaires étaient maintenant décédés depuis plusieurs années et la maison était fermée et inhabitée. Aucun proche parent qui savait quand et comment ce vieux casque avait été retrouvé.
Cependant, l'ami était généreux: un café au bar et la promesse d'aller dîner un soir avec les familles, parfois, c'est ce que m'a coûté cet objet.
Bien sûr, dès que je suis rentré chez moi, j'ai commencé à essayer d'en savoir plus sur l'ancien soldat qui possédait le casque.
Au départ sur le NARA, je ne l'ai pas trouvé, le patronyme oui, assez courant, mais pas de numéro de série qui correspond.
Il a fallu une autre recherche sur un site payant, et j'ai trouvé les premières nouvelles de notre soldat, avec l'indication du régiment, mais pas encore le numéro de série.
J'ai alors trouvé un site expressément dédié au 351 Régiment avec même des copies des rapports mensuels établis par le commandant du régiment, et ici les pièces se sont pratiquement toutes mises en place.
Le soldat en question s'appelait Denton Stubbelfield Samuel, connu à la fois comme Stubby et Sam; est né à Paris (pas votre capitale, bien sûr!) Lamar County, Texas, en 1917.
Il faisait partie d'une très grande famille, il avait trois sœurs et quatre frères, tous dans l'armée à l'époque.
Le voici sur une photo datée de juin 1944
Il était un Private First Class, numéro de série 38627890, et avait partagé toute l'expérience de guerre de sa division, arrivée sur le front italien (Garigliano) en février 1944, puis utilisée en continu tout au long de la campagne pendant plus de 200 jours en première ligne, avant d'être placé à l'arrière pendant la période hivernale entre 44 et 45, puis remis en ligne au début de 1945.
Alors Sam Denton était certainement passé pour Laiatico, a apparemment perdu son casque, mais il ne semble pas qu'il ait été blessé.
L'avancée se poursuit, après les collines Pisanes, vers Florence, puis la prise de Castel Del Rio et d'autres lieux de l'Apennin toscan-émilien.
Enfin, pour lui comme pour ses camarades, la période de calme relatif, entre la fin novembre et le début décembre, s'est retranchée dans une zone indiquée à 8 milles au sud de Bologna et à 16 milles à l'ouest d'Imola.
Ici, à leur tour, les soldats ont pu profiter de licences courtes, qu'ils ont passées principalement à Firenze et à Montecatini Terme, mais beaucoup ont réussi à se rendre à Roma pendant quelques jours, une situation qui a grandement contribué à restaurer le corps et l'esprit des militaires.
Voici des photos de soldats bien habillés et propres en bonne forme, prises par des journalistes militaires dans des situations calmes; ce sont des photos de LIFE clairement de propagande mais toujours très intéressantes.
Mais, comme je l'ai appris en lisant le journal rédigé par le commandant du régiment, même cette période n'était pas sans risques; tout d'abord, la canonnade presque continue de l'artillerie et des mortiers allemands, à tel point que le commandant a dit que c'était une rumeur selon laquelle les Allemands manquaient maintenant de ressources, car les canonnades, selon lui, étaient presque incessantes.
En outre, chaque nuit, des soldats étaient affectés à des patrouilles derrière les lignes ennemies, avec pour tâche de recueillir des informations, d'identifier les positions de mortier et d'artillerie, etc.
Eh bien, dans le cadre de ces activités, dans la nuit du 7 au 8 décembre, le Pfc. Denton, sous les ordres du First Lieutenant Wilson G. Weisert, avec d'autres camarades de la compagnie «L», se trouvait dans un endroit indiqué dans les rapports américains comme Casa Collina; ici, ils se heurtèrent à une mine qui, en explosant, blessa le lieutenant Weisert, qui avait perdu son pied gauche, et trois soldats, dont nos Denton.
Ils ont tous réussi à rentrer dans leurs lignes, et les blessés ont été transportés en urgence au 8° Evacuation Hospital, installé à Pietramala, près du col de Futa, face à Bologna.
Voici quelques photos de l'hôpital et du même endroit tel qu'il apparaît aujourd'hui; également une carte intéressante qui indique tout le chemin de guerre de l'hôpital lui-même dans la campagne d'Italie.
Le lendemain 9 décembre, le soldat Denton cessa de vivre de ses blessures; les autres blessés ont été sauvés.
Samuel Stubbelfield Denton repose encore aujourd'hui au cimetière américain de Florence.
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