Deux livres régionaux de la fin XVI° siècle.

Bonjour,
voici deux livres anciens acquis récemment.

L'un est un "Chasseneuz", il donne le droit coutumier du Duché de Bourgogne (actuelle région de Bourgogne à peu de choses près).
Il a été écrit en 1528, des textes sont de 1535, et le livre a été imprimé à Francfort sur Main en 1590.
Il est écrit en français et en latin.

Belle reliure en vélin, d'époque:





Le "privilège" est de Philippe, duc de Bourgogne:


Comme on peut le lire ici, il s'agit de Philippe le Bon, Duc de Bourgogne:


Traduction (si je me souviens bien du latin appris il y a 42 ans...):
Philippe est le fils de Jean, Duc de Bourgogne (Jean Sans Peur), fils de Philippe le Hardy, qui était fils de Jean Roi de France (Jean II "Le Bon").
Ce Philippe en question est donc Philippe le Bon, 1396-1467, auquel succéda Charles le Téméraire.

Mais pourquoi un privilège d'un Duc de Bourgogne décédé plus de 50 ans avant l'écriture du livre. Mystère pour l'instant...

L'auteur, Barthélémy de Chasseneuz:


Né vers 1480, mort en 1541 vers Autun.
Il a étudié le droit à Dole, Poitiers, Bologne, Turin et Pavie.
Il devient avocat à Autun en 1506.
Il est nommé conseiller au Parlement de Dijon en 1525, puis de Paris en 1531.
Il fut ensuite premier président du Parlement d'Aix.


Le second livre est encore plus intéressant car il est écrit entièrement en français.

Il s'agit d'un ouvrage de Louis Gollut, né à Pesmes en 1535, mort à Dole en 1595.
Professeur de latin à Dole, puis maire de Dole les 3 dernières années de sa vie.

Ce livre est l'histoire du Comté de Bourgogne (actuelle Franche Comté) de l'antiquité à 1590.
Il donne notamment des listes des grands hommes du Comté depuis 1300 environ, 275 noms et armoiries des Chevaliers de la Toison d'Or.
L’ordre de la Toison d’or est un ordre de chevalerie prestigieux fondé à Bruges (ville de l'État bourguignon) le 10 janvier 1430 par Philippe le Bon, duc de Bourgogne, à l'occasion de son mariage avec Isabelle de Portugal.
Le nom de l'ordre est inspiré du mythe grec de la Toison d'or.
Il relate surtout de l'histoire du Comté, en fait une description souvent très embellie et parfois faussée par excès de patriotisme.

Il tend à magnifier la ville de Dole où se tient le Parlement du Comté, et surtout à rabaisser la ville de Besançon (ville impériale).

Tout ça aura pour effet de faire interdire et même de faire brûler ce livre par le Parlement de Besançon dès 1593.

Gollut deviendra maire de Dole un an après la publication de l'ouvrage.

La reliure est en pleine peau, d'époque:




Le privilège est du Roi d'Espagne, Philippe III, mais qui est surtout Comte de Bourgogne:


Chose curieuse, ces deux livres viennent de deux endroits différents (Sens et Beaune), mais ont appartenu récemment au même propriétaire d'Andelarre près de Vesoul comme en témoignent les ex-libris!
 

Il avait acheté le Chasseneuz 800 frs en 1974 et le Gollut 1800 frs en 1972.

Comme on peut le voir, un exemplaire du Gollut avait atteint la somme de 580 000 frs en 1981 lors d'une vente!

Deux beaux et rares livres donc!

Ca me fait toujours une drôle d'impression de penser que Henri IV aurait pu les lire (il l'a peut-être fait...), et surtout que François 1° aurait pu lire le Chasseneuz   

Cordialement,
CG

salut,
je te félicite pour cette acquisition, une partie d'histoire dans ces deux livres....
une préférence pour le chasseneuz
cdlt,
valentin

Concernant le Gollut:
"Gollut, avocat au Parlement, revendiquait Dôle comme la capitale politique de la Bourgogne, ce qui fut considéré comme une hérésie politique. Son livre fut condamné par le Parlement de Besançon, interdit à la vente, puis brûlé."

Salut,
Bravo pour cet acquisition.
De Henri IV a Crevette,quelle chemin parcourue.

bmc

Il me reste plus qu'à entrer moi aussi dans les Livres d'Histoire   
En évitant de me faire assassiner   

Bonsoir,

Tu te nommerais César je me ferais plus de soucis ...   

Respect et Honneur ..   

Bonsoir,

Deux livres d'époque extras !

J'adore les vieux livres !

Cordialement,

Imperator Trajan

Super ces livres, en bel état pour l’époque

Impressionnant ces deux livres, ils doivent contenir une foule de détails sympa. J'ai eu entre les mains un traité de chasse et de botanique avec un passage sur la chasse aux loups en Normandie, on se rend compte du chemin parcouru.

Bonjour

Exceptionnel !

Cela fait encore plus militer contre la disparition des livres "physiques".

Citation :

Comme on peut le voir, un exemplaire du Gollut avait atteint la somme de 580 000 frs en 1981 lors d'une vente!

Si j'ai compirs, c'est le prix d'un des deux ?   

Befehl> Les livres physiques ne disparaîtront jamais. L'inverse ne serait que folie.

Oui c'est le prix réalisé en salle de vente aux enchères, c'est une bonne indication de la côte. Il faut cependant relativiser, Pontarlier est à côte de la Bourgogne, au moins deux collectionneurs locaux ont du se battre, il faut voir aussi suivant l’état de celui vendu en 81.

Quoi qu'il en soit ce sont deux livres exceptionnels et extrêmement rares déjà au siècle dernier, ils le sont sans doute encore plus aujourd'hui.

C'est ce que laisse comprendre cette annotation.
Mais ça me semble très élevé en comparaison avec sa valeur supposée actuelle!

Celui-ci:
http://www.auction.fr/FR/vente_livres_autographes/v20570_alde/l3916774_collection_sur_les_alpes_savoie_suisse_franche_comte_2eme_partie.html
est déjà plus correct question estimation (quoique très élevée!), c'est le même ouvrage, même édition.

Là:
http://www.amazon.fr/gp/offer-listing/B00I291XWU/ref=dp_olp_used_mbc?ie=UTF8&condition=used
c'est très très élevé!

A ces prix je doute qu'ils trouvent preneur rapidement!

Henri Rameau (1929-1993) qui a noté ce résultat de la vente de 1981 et à qui appartenaient ces deux livres était Docteur en Droit, historien et professeur de Droit à la faculté de Dijon.
Sa bibliothèque qui comprenait des milliers d'ouvrages a été dispersée lors de ventes à Dijon le 7 mars dernier.

Il semblerait que les prix de vente atteints lors de cette journée du 7 mars n'aient pas dépassé quelques centaines d'euros?

Voici le Gollut dans une édition plus récente du XVII°:
http://books.google.fr/books?id=ceA9AAAAcAAJ&printsec=frontcover&hl=fr#v=onepage&q&f=false

Attention, Pontarlier fait partie du Comté de Bourgogne.
Ce Comté était divisé en 3 baillages: Amont (actuelle Haute Saône), Dole (actuel Jura) et Aval, (actuel Doubs dont fait partie Pontarlier).
Ces correspondances sont très approximatives.

L'actuelle Bourgogne (voisine) c'était le Duché de Bourgogne.

Salut,
Le Chasseneuz dépasse le cadre régional.
Crevette doit savoir que le livre est imprime par Martin Lechler qui travaille exclusivement pour Sigmund Feyerabend,qui est parmi les plus grands sculpteurs sur bois(pour les illustrations et caractères de imprimerie) et "éditeur" de sa époque en Allemagne.A l’époque c'est le Allemagne
qui es "la" nation pour la imprimerie.

bmc

Le Chasseneuz par contre dépasse en effet le Comté de Bourgogne puis qu'il décrit les lois du Duché de Bourgogne.
Mais Duché et Comté sont intimement liés, même si leur histoire diverge depuis 1477, lors de la mort du Téméraire.

Je note pour Martin Lechler, en latin je n'avais rien trouvé de bien   

Existe t'il des textes ou renseignements sur Lechler ou Feyerabend, même en allemand?

re,
sur google: Sigmund Feyerabend.
Ailleurs c'est grâce a lui que le écriture "Fraktur" était utilise pendant les siècles.

bmc

Ah ben oui, tout simplement   

Le livre de loi pour le droit et l'arbre pour l'Histoire alors? L'ex libris prend tout son sens

L'annotation marque sans doute le record de vente.

Étrange que les résultats furent si bas lors de la vente de ce monsieur, c'est le genre de rdv que les bouquinistes loupent rarement.

C'est rare de trouver un livre du XVIe tout court, alors à un prix raisonnable... Je suis vraiment incapable de dire si la cote est excessive ou non. L'important c'est que tu te sois fait plaisir, ce dont je ne doute pas vu les ouvrages. Je pense que tu n'auras aucun mal à les revendre si tu le souhaites un jour.

Auquel cas je te conseillerai d'aller voir à Pontarlier, la vente a fait au moins un mécontent aux poches profondes à l’époque

Citation :

Sa bibliothèque qui comprenait des milliers d'ouvrages a été dispersée lors de ventes à Dijon le 7 mars dernier.

Pas d'autre solution que la vente?

Après le XVI° siècle, voilà le XV°.
Depuis les années 1450, l'imprimerie remplace les manuscrits.
Durant ce "1° siècle" de l'imprimerie, les ouvrages sont appelés "incunables".
Les incunables s'arrêtent (arbitrairement) au 31 décembre 1500, donc au dernier jour du XV° siècle.

Du 1° janvier 1501 aux années 1530 on parlera de post-incunables bien qu'ils ne diffèrent quasiment pas des incunables.

Un incunable se caractérise notamment par son format, souvent du in-folio (feuille simplement pliée en deux), ses caractères gothiques, ses lettrines peintes ou faites à la main, son impression sur deux colonnes, son absence de page de garde.

Ces incunables étaient édités en feuillets qui pouvaient être reliés ensemble pour former un livre.
L'imprimeur laissait en blanc les emplacements des différentes lettres destinées à être en couleur et aussi des éventuelles illustrations.
C'était ensuite repris par la personne chargée de peindre ces lettres et enluminures à la main.

Dans cette feuille, toutes les lettres en rouges sont peintes manuellement, aucune n'est donc identique à une autre:




Il s'agit d'un sermon d'un prédicateur nommé Leonhard Mattaeï de Utino (1400-1470): Sermones Quadragesimales Legibus.
C'est un dominicain né à Utino (Udines en Italie) qui enseigna aussi la théologie.
C'est imprimé à Ulm par Johann Zainer der Ältere (l'Ancien) en date du 9 mars 1478.

A défaut d'avoir un incunable complet (on en trouve à partir de 5000€), cette feuille qui a été contemporaine de Louis XI, Léonard de Vinci ou Michel Ange me suffit amplement!
Elle mesure 41 x 29 cm.

Bonjour

cela fait rêver